dimanche 15 avril 2018

La nuit et des poussières

Jean-Baptiste Gendarme

Gallimard, 2018



Si vous aimez les romans qui vous éloignent de votre quotidien et vous invitent à l’évasion, La nuit et des poussières n’est certainement pas la lecture qu’il vous faut. Pour ma part, si j’aime aussi ces livres-là, je suis irrésistiblement attirée par les textes qui scrutent l’environnement dans lequel nous évoluons et incitent à observer notre société et nos propres comportements avec un certain recul.

Les héros de Jean-Baptiste Gendarme nous ressemblent. Ils vivent en couple, travaillent - ou du moins ils essayent -, ont des enfants, des projets (parfois), des inquiétudes (beaucoup), connaissent des expériences douloureuses... Ils s’efforcent tant bien que mal de continuer à avancer et, plus que tout, tentent de trouver du sens à leur vie. Qui n’a jamais été confronté à ces questionnements ?
Soren est quant à lui en proie à une forme de vertige. Entre son père veuf replié sur lui-même qui ne s’intéresse plus guère à ses fils, son frère bipolaire atteint de sclérose en plaque et sa compagne dont les sentiments à son égard semblent s’être nettement émoussés au fil du temps, il n’a pas franchement l’occasion de se réjouir. Côté professionnel, il a bien quelques idées de documentaires à réaliser, mais rien de bien établi. Et lorsqu’il s’intéresse à l’actualité, les attentats et les effroyables faits divers qu’il se complaît à traquer dans la presse ne sont pas de nature à apaiser son esprit...

Mais c’est sur ses deux petites filles que se cristallise son angoisse. Ne risquent-elle pas, chaque jour, chaque instant, d’être victimes d’un accident ou d’un fou furieux ayant décidé d’éprouver une fois dans sa vie un sentiment de puissance en tuant en quelques minutes un maximum de personnes ? Et puis, sans même parler de leur offrir les conditions propices à leur épanouissement, comment leur apporter le minimum vital lorsqu’on ne fait plus rentrer d’argent dans le foyer ?

Dans un style épuré et factuel, Jean-Baptiste Gendarme brosse le portrait d’individus privés de toute forme de reconnaissance, désespérément seuls face à un monde qui apparaît de plus en plus agressif, d'individus dépossédés des soutiens affectifs qui leur permettraient de faire face à sa férocité.

C’est noir, c’est sans concession. Mais même si la plupart d’entre nous parvenons à construire un équilibre - plus ou moins fragile - pour ne pas connaître la destinée du héros de ce roman, on ne peut s’empêcher de discerner certains de nos traits dans le miroir que nous tend Jean-Baptiste Gendarme... Et il est certain que cela fait froid dans le dos...

11 commentaires:

  1. Un peu trop noir pour moi en ce moment je crois.

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    1. Du coup, si tu as envie de découvrir l'auteur, je te renvoie au conseil de Nicole :-)

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  2. Ce livre a l'air en effet, bien ancré dans la réalité...

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  3. Repéré... Le sujet me parle. Très envie de le lire même si j'ai fait la connaissance de l'auteur dans une veine beaucoup plus humoristique (Splendeurs et misères de l'apprenti écrivain : si tu ne l'as pas lu, je te le conseille pour un jour où tu auras besoin de quelques éclats de rire)

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    1. Ce serait même pas mal d'enchaîner, en fait, pour repartir sur une note plus douce.
      Ceci dit, c'est ce que j'ai fait : ce week-end, je me suis offert une petite friandise tout en légèreté avec un roman inspiré de Dumas :-)

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  4. Moi je note, je suis plus attirée par les sujets ancrés dans le quotidien que par l'exotisme...

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  5. Commandé auprès de ma libraire samedi, et j'ai vraiment très hâte. Une auteure m'en avait parlé et les chouettes avis lus jusqu'ici ne m'ont pas incitée à en faire autrement.

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    1. Eh ben, voilà, formidable !
      Hâte de le découvrir sur ton blog...

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  6. Pas forcément le genre de roman qui m'attire en ce moment (mais en même il n'y pas grand chose qui m'attire alors...).

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    1. Aïe aïe aïe, toujours pas sorti de ta morosité littéraire ? :-(

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